jeudi 19 septembre 2013

Oncle Sam in your pussy

On sait qu'il y a tout un tas de trucs que nos amis les Américains ne voient pas comme nous. Je ne parle pas de la bouffe, de la liberté d'inciter à la haine raciale, de brûler des croix en pleine campagne youkaïdi youkaïda, ou de produire des séries géniales en payant correctement des scénaristes créatifs...j'ai un grand respect pour l'Amérique qui a inventé Laura Ingalls, sans qui mon enfance eut été bien morne (je parle des livres bande d'ignares, pas de la série indigente du même nom).
Ce qui m'épate c'est leur tendance à traiter avec le plus grand sérieux des campagnes partisanes dont la bêtise ferait passer la culture de Sarah Palin pour celle d'une académicienne.

L'Obamacare est une mesure adoptée sous l'égide de comme son nom l'indique, et qui vise à couvrir un peu plus et un peu mieux la population américaine en termes de sécurité sociale (Wiki vous donne les détails si ça vous intéresse). Yen a toujours qui sont pas contents, notamment ceux qui y voient une fois de plus l'ingérence d'Oncle Sam, le Big Government, qui en les obligeant à payer moins cher le toubib les prive de la liberté individuelle de crever plus vite de leur obésité morbide (oui ben moi aussi je peux être de mauvaise foi si je veux).

Voici la jolie campagne de pub dont ces adorables conservateurs viennent d'accoucher (je pèse mes mots).
On y voit une jeune fille qui se rend pour la première fois dans une clinique gynécologique pour se faire examiner (routine on imagine). Lorsqu'elle confie à l'infirmière qu'elle a choisi l'ObamaCare, on sent la raideur de la praticienne (c'est vrai ça quelle idée, se faire soigner sans payer! Elle manque pas de toupet la morue. Ah ces jeunes. Je parie qu'elle ne se garde pas intacte pour le mariage en plus.)

Jetez-y un oeil, on en discute après:



Alors déjà on remarque dans la première scène que dans les cliniques américaines, l'intimité c'est pas ça hein. Ya la caméra de surveillance qui mate TOUTES les pièces. Bon, la machine à café je dis pas, les couloirs ok, on sait jamais au cas où yaurait des malades qui voleraient la moquette, mais ils filment aussi DANS LES CHAMBRES:


Là la pauvre nénette heureusement pour elle, elle dort mais imaginez si elle était en train de vider sa poche à caca ou de vérifier que son épisio n'a pas craqué, hein, joli travail, bonjour le droit à l'image.
Et comme les médecins américains sont vraiment de gros sadiques, ya aussi une caméra dans la salle d'auscultation:
Alors là on est en droit de se dire que le toubib palpe les glandes du jeune homme, encore une fois quelle chance, c'était pas aux couilles qu'il avait mal.

Donc c'est ambiance Big Brother à la clinique, déjà ça commence bien.

On fait ensuite la connaissance de la jeune innocente venue se faire examiner le minou et qui déjà suscite la désapprobation de l'infirmière chargée de son dossier (notez la mimique):

Ca ça veut dire "Ma cocotte tu fais confiance à ce communiste d'Obama, t'es mal partie dans la vie".
Du coup l'infirmière lui montre négligemment la porte et lui dit de mettre une blouse, que le docteur va arriver bientôt.
Digression culturelle.
En France quand on va chez la/e gynéco on se met à poil. Pour celles qui n'y sont pas encore allées (c'est mal) et ceux qui n'auront jamais la chance de chausser d'autres étriers que ceux d'un étalon, en gros ça consiste:
- À poser ses fesses tout au bord tout au bord de l'espèce de lit obstétrical, les jambes en l'air et bien écartées (non c'est pas aussi sexy que ça en a l'air), avec entre son cul nu et le skaï un espèce de PQ géant dont les pointillés craquent forcément à tous les coups pour qu'on se retrouve le bas du dos bien collé.
- A voir une dame (souvent) un monsieur (parfois) qu'on vouvoie, dont on ne connaît même pas le prénom ni les goûts musicaux, regarder notre abricot offert et mettre un paquet de trucs dedans (doigt/sonde/spéculum/gant en sac poubelle/grattoir (sisisi j'ai bien dit grattoir)) genre pour voir tout ce qu'on peut y coller sans que ça déborde.
- A subir la chouette expérience "une main dedans, une main dehors" où la dame (disons que c'est une dame) se touche les deux majeurs (et les index pendant qu'on y est, quand yen a pour un yen a pour deux) dont un est DEDANS ta chatte et l'autre SUR ton ventre. Magie!
- À s'assoir les mains derrière la tête, nue toujours (oui ça fait très Histoire d'O) et à se faire palper fermement les nichons tout en se demandant si la dame n'a rien oublié à l'intérieur.
- À se peser (le pire).

Quand on est passée par tous ces caps, autant dire que l'idée même de dignité ou de pudeur est comparable à celles de Jean-Marie Bigard après trois mojitos.

A priori aux États-Unis les filles sont faites comme nous (en gros nichons+minou = cancer du col de l'utérus à gogo) donc on leur fait tout pareil MAIS avec une blouse parce que faut pas déconner, je veux bien me faire racler le fond de la chatte mais je veux pas que le toubib me regarde le piercing.
(A moins que la gynéco ne touche à rien pour ne pas se faire taxer d'ingérence ou d'atteinte à la liberté individuelle de la moule.)

On retrouve la demoiselle en blouse et en tête à tête avec son toubib, qui après les questions d'usage (PAS: êtes vous réglée régulièrement? Ni vous avez mal quelque part? Ni avez-vous des rapport sexuels, et si oui est-ce que tout se passe bien? Mais "Des changements de régime ou d'activité sportive?" Parce que c'est vrai que c'est important, l'exercice et les big macs. Pas comme les pertes vaginales qui ne sont qu'un détail) lui dit "OK! On va regarder tout ça!" et SE TIRE. La laissant en plan, les jambes écartées. Et là BOUUUUUH qui c'est qui va regarder la jolie demoiselle entre les deux cuisses yeux ? Le vilain Oncle Sam! (Comprendre l'horrible Obama, mais ils n'ont pas osé, curieusement, mettre sa tête). et là on atteint le sommet du ridicule avec un affreux pantin brandissant un spéculum (oui messieurs ça ressemble donc à ça) d'un air sadique (car c'est bien connu, le frottis de dépistage c'est le MAL).



Et le slogan qui tue:
"Ne laissez pas le gouvernement jouer au docteur".

Yaurait des pages et des pages à écrire sur le système de santé américain. Sur leur façon d'aborder la sexualité féminine, la contraception et le droit à l'avortement. Ici il ne s'agit pas de ça: il s'agit de prendre pour des connes les femmes qui connaissent l'importance de la surveillance médicale en tentant de faire passer le message que subventionner les dépistages est une mauvaise idée. Il s'agit de faire peur aux gamines qui n'y sont jamais allées et qui vont entamer leur vie sexuelle sans filet (mais avec papillomavirus). Et il s'agit de montrer à quel point le gouvernement est malfaisant (le plan final où on ne voit que les jambes de la jeune femme s'agiter a une petite connotation "viol" fort sympathique. D'un autre côté elle l'a bien cherché, tu vas payer tes soins en nature ma cocotte). Avec des images dont le ridicule tranche avec le sérieux du message. Un mélange de Muppet-show et de film d'horreur gynécologique.



Tout de suite, ça prend une autre saveur.


jeudi 12 septembre 2013

Si, moi.

Depuis six mois, tous les jours je me dis que je vais fermer ce blog. Et je retourne dans ma tête toutes les possibilités de post d'adieu.

Car un beau matin j'ai enfin reçu la lettre qui allait mettre fin à mon stage chez les fous. En gros elle disait: chère madame, voulez-vous retourner habiter dans un joli appartement à côté des écoles des mômes, dans un immeuble tout propre et sans cafard, plein de bourges dedans et encore plus de bourges autour? Ca ne vous coûtera que la modique somme de deux fois votre loyer actuel, mais un peu de prostitution occasionnelle n'a jamais tué personne, et puis votre fille a douze ans, que le temps passe vite, madame hier encore elle était si petite.

Bref s'est très rapidement imposé à moi ce non-choix: crever  vieille et seule, chauve et égrotante (mais avec du vocabulaire) dans un appartement glauque dont les murs me jetaient à chaque instant leur haine et leur mépris moisi et bétonné à la gueule, en regardant des files de cafards hilares sortir des aérations au son des voisins assommant leurs enfants et en attendant une improbable aide-soignante morte de faim et de soif dans l'ascenseur en panne, la langue collée à l'écran de l'iPhone, après une vaine tentative de manger les bonbons de candycrush pour ne pas succomber

OU

vivre.


Donc je suis partie. En regrettant simplement que les quelques bons souvenirs que j'avais pu y fabriquer aient été gâchés par le cadre, et en priant pour ne pas emporter de sale bête dans les cartons.
(J'ai tellement vaporisé de produits chimiques dégueulasses que j'y ai perdu au moins six mois d'espérance de vie et que les cafards me surnommaient Bachar.)
J'en ai emporté deux.

La première nuit dans ma nouvelles maison, j'ai pas dormi. Comme la veille non plus (ce serait dommage de se fader un déménagement toute seule en forme faut dire, et puis mon ange gardien visiblement il est bourré du soir au matin), j'étais passablement hallucinée. Sur le coup de trois heures j'ai enjambé les cartons pour boire un verre d'eau dans la cuisine et Paf, la bestiole, par terre, sur le lino.

Comme j'étais très très fatiguée, qu'elle n'a pas crié tout de suite et qu'elle m'a semblé avoir une drôle de couleur, j'ai décrété que ce n'était pas un cafard mais un produit de mon imagination névrosée et proche du burnout et je l'ai tuée et chiottisée et je suis retournée au lit pas dormir.

Du coup la troisième nuit, j'ai pas dormi non plus (un jour j'ai traduit les mémoires d'un type qui avait été torturé à Guantanamo. Mon gars, je compatis.)

Du coup, le troisième jour, j'ai accroché ma clé au clou (c'est la première chose que je fais quand j'emménage: je fixe les crochets pour mettre les clés. Faut jamais jamais jamais perdre ses clés. Sinon on redevient petite fille avec un papa qui hurle QUI A TOUCHÉ MES CLÉS NOM DE DIEU DE PUTAIN DE BORDEL DE MERDE et qui balance des torgnoles verbales combien je vous dois docteur?) donc j'ai accroché ma putain de clé au clou disais-je, et je suis sortie de chez moi.

Et j'ai regardé mes mains. Vides. Ma porte. Fermée. Mon absence de clé. Mes yeux ont regardé l'intérieur de ma tête: tout le malheur des quatre dernières années était en train de remonter à la surface comme du vomi de vieux poivrot cirrhosé, en direct tout droit du coeur. J'ai entendu mon père mort ricaner. J'ai entendu tous les cafards morts par ma faute ricaner. Je suis allée au troquet d'en bas, je me suis enfermée dans les chiottes et j'ai pleuré.

Le lendemain, comme grâce à mon pote cambrioleur j'avais quand même pu sortir des chiottes et rentrer chez moi, j'ai défait des cartons, et là pouf, sortant d'un pouf justement, un cafard. Un vrai, nickel, pleine bourre, super content de lui, hé les gars zavez vu ma nouvelle maison??????

Il a pas couru longtemps car malgré l'épuisement j'avais encore du réflexe et pouf le cafard du pouf.

Du coup, j'avais déjà jeté mon lave-vaisselle et mon frigo pour cause de colonisation intense, j'ai bazardé tous mes poufs.

J'ai acheté des pièges à cafards qui collent, des qui empoisonnent, j'ai vaporisé partout, j'ai attendu.

Six mois.

Yen a PLUS.

Je viens de jeter les pièges. La Poste ne fait plus suivre mon courrier. Le Fisc m'écrit à ma nouvelle adresse. Moi je ne suis pas encore tout à fait arrivée, mais ce qui est certain c'est que je suis totalement partie.


Alors le blog? Il n'a plus de raison d'être.
Plus d'iguane, plus de cafard, plus de voisins atroces, plus de Ginette, plus de gérant débile, plus de rats.

Et puis une nuit j'ai pu constater que l'insonorisation de mon nouveau logement avait été assurée par un sourd manchot et cocaïnomane. Que j'avais un voisin somnambule qui jouait des claquettes en duo avec une chaise à 1h28 tous les MATINS. Que finalement le loyer, c'était trop cher. Que c'est pas possible d'avoir une vie d'agent secret (je suis agent secret) quand tout le quartier voit dans ton salon en emmenant les enfants à l'école (je suis au premier étage) que tu es en train de faire une chorégraphie des demoiselles de Rochefort d'écrire à Poutine (agent secret je vous dis).

Bref, j'ai trouvé D'AUTRES raisons de me plaindre.

Et j'aime bien mon titre de blog.

Alors je ferme pas. Je continue. Je diversifie. Je reviens.

Bisous.